Les décès en raison des opïodes aux É.-U. et au Canada ont atteint un niveau sans précédent, ayant ravagé les communautés à travers les divisions régionales, ethniques et socioéconomiques. Mais aucune industrie ne connait des taux élevés à la dependence et au décès que notre propre industrie : la construction.
« C’est quelque chose qui a durement frappé notre industrie, » mentionne le président international Lonnie Stephenson. « Je veux que chacun de nos membres sache que le FIOE s’engage à faire tout son possible pour venir en aide à tous nos confrères et à nos consœurs qui souffrent. Personne n’est seul dans ce combat. »
Selon le « National Institute on Drug Abuse », tous les jours à travers les É.-U., plus de 130 personnes décèdent en raison d’une surdose d’opioïdes. Les chiffres sont proportionnellement semblables au Canada où comme aux É.-U., la crise est alimentée par une combinaison de facteurs, y compris des médecins insouciants, les compagnies pharmaceutiques avides de profit et plus.
« Il existe une culture individualiste au Canada et aux É.-U. qui dit : “ à chacun ses affaires. Nous réglons nos affaires en privé, ” dit Jim Watson, le représentant international responsable du département de l’éducation qui administre les formations sur la santé mentale et la dépendance. « Nous devons donc commencer à en parler. »
Selon le « Midwest Economic Policy Institute », depuis 1999 la vente d’antidouleurs sur ordonnance a grimpé en flèches de 300 %. Et depuis 2012, plus de 259 millions d’opioïdes vendus sur ordonnance ont été rédigés, assez pour que chaque américain ait sa propre bouteille.
Bien sûr que les opioïdes peuvent être pris de façon sûre et peuvent aider beaucoup de gens en douleur. Mais trop souvent, ils sont mal utilisés; et pour ceux qui travaillent dans le domaine de la construction, c’est presque la recette idéale pour créer une dépendance.
Il n’y a que peu de métiers qui en demandent plus physiquement. Le taux de blessures est 77 % plus élevé que la moyenne nationale selon le MEPI, il ne faudra donc pas être étonné que l’abus de substance soit presque deux fois plus élevé que la moyenne nationale.
De plus, les travailleurs dans l’industrie de la construction sont seulement payés s’ils se présentent au travail, donc, le médicament contre la douleur est aussi fréquent que des casques de protection et des rubans à mesurer. Du repos à la maison et la physiothérapie ne règlent pas les factures.
Selon une analyse menée par « Plain Dealer » à Cleveland, les travailleurs de la construction sont sept fois plus susceptibles de mourir d’une surdose à comparer à d’autres personnes à l’Ohio. En Colombie-Britannique, 55 % des morts causées par des surdoses dans la province étaient des travailleurs dans domaine de la construction et du transport, rapporte l’« Ottawa Citizen ».
Les chiffres du « Plain Dealer » de 2016 pointent la plupart des décès sur l’héroïne ou le fentanyl (un opioïde synthétique plus mortel que l’héroïne), mais plusieurs de ceux qui sont décédés ont commencé à utiliser des antidouleurs sur ordonnance trompeusement commercialisés comme médicaments sans danger.
« Ils savaient depuis toujours que ce médicament crée une dépendance, » mentionne membre Brian Galvin du local 103 au sujet de l’industrie pharmaceutique. « Le système est fêlé. »
Galvin âgé de 43 ans avait souffert de dépendance à un jeune âge. Il ne consomme plus depuis 2006 et maintenant, il aide les autres qui vivent un combat semblable.
« Nous devons mettre fin à la stigmatisation qui entoure la dépendance à la drogue et à l’alcool, » déclare Galvin. « Ces gens qui sont atteints de cette maladie ne sont pas de mauvaises personnes qui veulent devenir de bonnes personnes, mais des gens malades qui veulent guérir. »
Une étude menée au « Department of Public Health » au Massachusetts a montré que les travailleurs dans les métiers de la construction et dans l’exploitation minière comptaient environ un quart de tous les décès en raison d’une surdose aux opioïdes dans l’État de la Baie. Le rapport a ainsi démontré que le taux de blessure est plus élevé dans le domaine de la construction que dans les autres domaines, avec le mal de dos étant la maladie chronique la plus fréquente.
C’est de cette façon que tout a commencé pour le membre Bryan Snow du local 103. Les analgésiques opioïdes qui lui ont été prescrits étaient accompagnés de la mise en garde habituelle, mais rien qui indiquait le niveau de dépendance qu’il a vécu.
« La dépendance t’amène dans un endroit très sombre, » dit Bryan. « Tu prends le médicament pour te sentir normal et lorsqu’il a perdu son effet, tu ne te sens jamais bien. C’est sans issue. »
Heureusement qu’il y a eu des gens qu’ils l’ont remarqué, y compris ceux du local 103, et ils lui ont trouvé l’aide nécessaire.
« Si mon syndicat ne m’avait aidé, je ne serais pas où je suis aujourd’hui, » ajoute Snow, qui vient d’une famille d’électricien. « Je devais également être un participant actif, mais je devais également réaliser où j’étais rendu. »
Le local 103 a récemment tenu une conférence d’une durée d’une semaine organisée par les syndicats des métiers de la construction dans la région de Boston au sujet des troubles liés à la consommation de substances et à la stigmatisation qui les entoure.
Les organisateurs de l’évènement ont fait une demande pour avoir la naloxone disponible sur tous les chantiers de construction. Parfois appelée sous le nom de marques telles que Narcan et Evzio, la naloxone est un médicament qui peut sauver la vie en renversant les effets d’une surdose d’opioïdes. Snow dit qu’il en transporte toujours avec lui. Cela fait partie de sa décision d’être franc au sujet de sa dépendance et de son rétablissement et de dire aux autres qu’ils ne sont pas seuls.
« Je suis ici pour dire que tout va bien aller et il y a moyen de s’en sortir, » assure Snow.
Mettre fin à la stigmatisation
Mais on nous bloque souvent le chemin pour s’en sortir.
Il y a des problèmes d’ordres structurels qui poussent les gens vers la dépendance, comme un manque relatif à un congé payé ou la mentalité de travailler malgré la douleur, mais les préjugés qui sont associés aux personnes qui ont un problème de dépendance peuvent être tout aussi nuisibles. « Juste parce que quelqu’un à un problème de dépendance, ne fait pas d’eux de mauvaises personnes, » dit Snow. « Si quelqu’un est atteint d’un cancer, on ne le jugerait pas ou ne l’éviterait pas. Nous devons traiter la dépendance de la même manière. »
Une fois que certains antidouleurs ont pris le contrôle, les préjugés associés non seulement à l’abus de substance, mais à la santé mentale en général, rendent souvent le rétablissement plus difficile.
« Nous gardons ces choses en secret et nous gardons le silence à ce sujet, et cela nous fait mal, » mentionne Watson. « Nous devons nous éduquer et éduquer nos dirigeants sur la manière dont nous devons faire face à cette situation. »
Watson nous fait remarquer que le taux de suicide est plus élevé pour ceux qui ont un problème de dépendance et un rapport présenté par les « Centers for Disease Control » a conclu que ceux qui travaillent dans l’industrie de la construction et l’exploitation des ressources minières représentent le plus haut taux de suicide chez les hommes. La consommation d’opioïdes est associée à une augmentation d’une probabilité de 75 % pour faire une tentative de suicide, selon l’« Addiction Center ».
« Il n’y a pas moyen de parler de dépendance sans parler de suicide aussi, » ajoute Watson. « Nous devons parler de tous ces problèmes. »
De parler de sujets délicats comme la dépendance, la dépression, le suicide et d’autres problèmes de santé mentale ne sont pas aussi faciles pour certaines personnes, spécialement pour les hommes, dit Watson. Et les métiers dans le domaine de la construction sont majoritairement dominés par les hommes. De plus, selon l’« American Foundation for Suicide Prevention », les hommes meurent par cause de suicide à au taux trois plus élevé que celui des femmes.
« C’est une culture qui est menée par la testostérone. Les hommes ne parlent pas de leurs émotions ni de leurs douleurs, » confirme Watson. « Il y a cette mentalité de, ‘’si je suis émotionnel, alors je ne suis pas un homme’’. »
Watson qui siège au comité consultatif en éducation du Congrès du travail du Canada dit qu’il passe beaucoup de temps dans ses formations à créer une espace où les membres se sentent suffisamment en sécurité pour parler ouvertement de leur situation. Les formations ont reçu de bonnes critiques, dit-il.
Stephenson a nommé le directeur du département de la construction et de l’entretien Mike Richard pour siéger au groupe de travail destiné aux opioïdes du « North America’s Building Trades Union ». En ce moment, le groupe de travail collecte des données et les meilleures pratiques auprès des É.-U et du Canada et prépare un plan d’action pour être recommandé aux présidents du NABTU, dit Richard.
« Nous avons des membres qui meurent et qui souffrent en raison de la dépendance, et nous avons l’obligation morale de faire le maximum, » ajoute Richard.
Le groupe de travail a ainsi mis en œuvre des lignes directrices en la matière pour les centres de traitement.
« Les centres de traitement ne sont pas tous les mêmes ou même efficace, » dit Richard. « Il y en a beaucoup qui sont motivés par l’argent, et le traitement de nos membres est trop important pour laisser le hasard décider. »
En juin, Stephenson a participé à une discussion organisée par « The Kennedy Forum », une organisation qui œuvre dans les problèmes liés à la santé mentale. La réunion faisait partie d’un évènement d’une journée et était centrée sur la lutte contre les préjugés négatifs liés à la santé mentale dans le milieu de travail.
« La dépendance peut rattraper n’importe qui, et chaque membre de la FIOE doit être au courant que l’abus de substance est surtout et avant tout une question de troubles liés à la santé mentale qui doit être traitée, » mentionne Stephenson. « Et vivre avec un problème de santé mentale fait partie de cela. »
Le rapport de MEPI au sujet de l’épidémie d’opioïdes dans le secteur de la construction est centré sur le Midwest, qui souffre d’un des plus hauts taux en matière d’abus de substance et de décès. Les recommandations du rapport pour faire face au problème peuvent s’appliquer à travers le Canada et les É.-U.
Les recommandations permet entre autres d’offrir une assurance maladie qui couvre l’abus de substance et le traitement pour les raisons de santé mentale, favorisant des alternatives aux opioïdes tels que la physiothérapie, des médicaments anti-inflammatoires pour certaines blessures, fournir au moins deux semaines de congé payé en raison de maladie et de mettre les politiques à jour pour permettre de réaliser des contrôles réguliers d’antidopage et non de congédier quelqu’un immédiatement après avoir testé positif.
Watson nous informe que la plupart des locaux ont des programmes d’aide aux personnels qui offrent de l’aide à ceux qui ont un problème lié à l’abus de substance. Cependant, plusieurs de ces programmes couvrent seulement six visites, et tout dépend de la disponibilité, un membre doit peut-être s’absenter du travail pour s’y rendre.
« On pense que c’est un programme qui peut s’appliquer à tous, mais nous devons le personnaliser afin de le voir de manière ayant plusieurs approches, » dit Watson. « Trente jours peuvent suffire à une personne, mais pas pour tous. »
« Ça prend une tribue »
Le local 43 à Syracruze, NY; le local 98 à Philadelphie; le local 99 à Providence, R.I. et le local 213 à Vancouver en Colombie-Britannique offrent tous une formation sur la naloxone à leurs membres et dans certains cas aux membres de la famille.
Pour la part du local 43, la formation faisait partie d’un programme complet qu’ils ont développé à l’aide d’un hôpital. Le gérant d’affaires Al Marzullo a fait suivre la formation à environ 150 apprentis.e.s jusqu’à présent et il a également tenu une formation pour l’ensemble des membres et à leurs familles à laquelle était largement suivie.
« Je ne savais pas si la formation aurait été bien reçue, mais nos apprentis.e.s et nos membres en étaient très heureux, » dit Marzullo. « Ils ont accordé toutes leurs attentions pendant la présentation. »
Pour Marzullo et pour le local, c’est personnel. Un apprenti de deuxième année est décédé l’an dernier.
« Ce métier est difficile en soi, mais la chose la plus difficile a été de voir un apprenti âgé de 26 ans placé dans un cercueil et d’exprimer mes condoléances à ses parents, » exprime Marzullo. « À ce moment-là, je savais qu’on devait faire quelque chose. On devait le prévenir. »
Le local 99 offres des services de rétablissement et un groupe de soutien anonyme, dit Alvin Reyes, le représentant de Reach Out and Engage the Next Generation of Electrical Workers. RENEW en collaboration avec NextGen au Canada, sont deux initiatives qui vise à faire participer plus de jeunes travailleurs dans le syndicat. Ces services sont offerts avec l’appui de RENEW afin de refléter ces efforts coopératifs entre le local et le chapitre, dit Reyes.
« Cette situation de crise nous a tous touchés, » dit Reyes, qui est également le coordinateur du service de la syndicalisation du local 99. « Nous voulons leur faire savoir que nous sommes une famille et on n’abandonne pas notre famille, spécialement en période de crise. »
« RENEW/NextGen a un rôle important à jouer, » indique Tarn Goelling, directrice de la participation civique et communautaire. Selon le MEPI, 66 % de ceux qui abusent des médicaments contre la douleur se situent entre l’âge de 18 et 34 ans.
« Ceci représente une occasion pour RENEW, » dit Goelling. « Leur rôle vise à aborder les problèmes qui affectent les jeunes membres, et en leur fournissant la bonne éducation et les outils, les chapitres peuvent réellement être le pont entre leurs membres et les locaux. »
Le vice-président international Brent Hall du Dixième District a tenu une séance pour prendre de l’avance lors la Conférence annuelle aux États-Unis pour les dirigeants d’Arkansas, en Caroline du Nord, en Caroline du Sud et au Tennessee.
« La présence de la crise d’opioïde dans quatre de nos États a atteint une ampleur épidémique. Nous serons naïfs de croire que nos membres ne peuvent pas y être piégés, » ajoute Hall.
Les autres districts ont pris des mesures semblables ou ils planifient faire engager les membres et les dirigeants sur le sujet lors des prochaines réunions.
Au niveau international, la FIOE a appuyé et va continuer à faire ses recherches dans le but de trouver des mesures de type législatif aux É.-U. et au Canada pour offrir de plus grandes possibilités de traitements et de trouver des solutions à cette situation de crise. Il faut davantage de recherches en matière de médicaments alternatifs contre la douleur et qui n’engendrent pas la dépendance, et les législateurs dans les deux pays doivent en faire plus pour retirer du marché ce qui en effet, de l’héroïne légale.
Galvin et Snow insistaient sur l’importance de s’appuyer dans le but à savoir comment identifier une consœur et un confrère qui en souffre. Ils sont heureux de pouvoir jouer leur rôle à titre d’anciennes personnes qui avaient un problème de dépendances qui sont en position d’aider les autres, y compris leurs confrères et leurs consœurs.
« Quelqu’un l’a fait pour moi, » dit Snow. « Donner en retour fait partie du rétablissement. »
En sachant qu’on a accès à un réseau d’aide est excessivement important, ajoute Galvin.
« Ça prend une tribue, » dit Galvin. « S’il n’y avait personne pour m’aider, je serais sans doute mort. »
De quelle façon votre local compte-t-il combattre la crise d’opioïdes et autres abus de substances ? Faites-nous parvenir vos idées, et on pourrait les publier dans un prochain article du Electrical Worker. Communiquez avec nous par courriel à l’adresse suivante : media@ibew.org.
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